samedi 30 juin 2007

BRÛLE CIERGE


dans neuf mois, si tout va bien
On trouvera ici un poème nouveau-né

un petit roi hurlant

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[Image: Brûle cierge par reading_is_dangerous]

vendredi 29 juin 2007

LE GROS MOT BILE


Je connaissais un gros personnage qui disait
« Qu’on a toujours besoin d’un plus petit mot que soi »

il voulait dire, je crois
Qu’un gros mot a toujours besoin d’un plus petit que soi

il faisait macérer chez lui des mots
Qui perdaient ainsi toute partie soluble

il appelait ça « conserver des mots dociles, des
Mots mous pour tuer d’autres mots mous. »

il riait des derniers mots agonisants
Trouvés dans des phrases mortes

il pondait parfois un mot crevé ou qui pourrissait immanquablement
Au volant, il frappait volontiers les mots qui traversaient la route

il répétait « qu’il y a des mots qu’on n’aura jamais, des
Mots dangereux, indicibles. »

il construisait sans relâche des murs en peaux de mots
Pour ses troupeaux de mots, ses blancs troupeaux

il expliquait « qu’il faut dresser périodiquement la majorité des mots contre
Une minorité, n'importe laquelle, et garder certains mots au loin, à tout prix. »

il égorgeait parfois un mot
Pour étouffer un cri

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[Image : Mot bile par reading_is_dangerous]

jeudi 28 juin 2007

MISSY PRISE AU PIEGE


Missy était prise dans un piège pour les petits oiseaux
Cette situation se surajoutait à elle-même puisque
Missy était déjà prise dans un piège pour les petits oiseaux

*

Ziusudra, son maître, l’avait longtemps tenue attachée à une sangle
Clouée au lit
Mais Missy en avait eu assez. Brave Missy !

avec un pointe de fer, elle s’était libérée
Puis son maître, eh ! Missy l’avait . . . avec la même pointe
Avant de le brûler vite fait dans un bain d’acide estrapaphosphorique

« tu n’es plus. » dit Missy qui surveillait la dissolution du corps
« Tu as cessé, tu as disparu. » dit-elle encore
« Tu es mort. » dit-elle pour en finir. Brave Missy !

elle quitta enfin le grenier
Où elle avait vécu
Pendant les sept dernières années

deux années « rouges »
Puissantes
Pendant lesquelles Ziusudra avait « conditionné » Missy

deux années vertes, les années du « loup »
Pendant lesquelles Missy devint une fine connaisseuse
Du froid, de l’excuccion du froid

une année jaune, année de mixtion
Pendant lesquelles le maître prépara plusieurs drogues
Des drogues pour la chute, pour attirer encore d’autres chutes

ah ! ah ! L’année jaune fut pour Missy
Une période pendant laquelle elle ne s’habitait plus elle-même
« Même pas mes faubourgs intérieurs. » disait-elle

vint ensuite une année bleue, une année dite de « Contenance »
Lourde comme la mer et le ciel réunis
« Il faut enlever tout cet air à l’intérieur. » disait Ziusudra

la huitième année allait être une nouvelle année rouge
« Reconditionnement, » expliquait le maître. « et tests d’extensibilité. »
Mais Missy, brave Missy. . .

*

Elle s’était donc libérée, vengée. Elle recommença à vivre
Pourtant elle restait prise. . .
Deux fois prise dans un piège pour les petits oiseaux

car sa malheureuse chanson était maintenant connue en ville
Déjà les prédateurs salivaient des mandibules
Déjà on préparait d’étranges gâches. . .

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[Image : Reginglette par reading_is_dangerous]

mercredi 27 juin 2007

FORTIFICATION


son corps picoté d’animal
Elle s’en dégage

d’abord un œil. On dirait un cloporte qui s’en va
Ensuite elle enlève cette clôture qui lui servait de peau
Puis le peu de terre qui recouvrait son être enfoui

quel progrès déjà !
Son nouvel état convient aux chemins les plus délicats

elle prépare les premiers mètres de la route qui l’intéresse
Elle la désencombre des prêches mécaniques qui l’obstruaient
Elle rend à leurs propriétaires des dépôts de passions, de sentiments

elle peut enfin œuvrer au rétablissement de la paix
Sans autre délai, sans crainte
Elle se met en quête d’un guide

. _ . . _ . . _ . . _ . . _ .


ce qui précède est la version simple et courte
De l’introduction à une instruction complète et intitulée
LA FORTIFICATION DES MURS DE LA CHAMBRE D’ISOLEMENT

la chambre en question, c’est bien sûr ce lieu intérieur
Où doit rester enfermée la créature gourmande appelée dés. . .

Oh ! Une blatte ! Je l’écrase sans méchanceté
Mais point de lamentation !
Point de chant funèbre
Point d’éloge

il n’y a en effet que le silence qui puisse servir de guide
Lorsqu’on va à la chambre d’isolement

elle y va
elle y va
ELLE Y ENTRE !

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[Image : A lintérieur par reading_is_dangerous]

dimanche 24 juin 2007

DE L'OR POUR LES ORTEILS D'ATHALIE

il faut ajouter des taches aux taches
Et aux nouvelles taches, encore des taches
Plus petites et plus grosses
Des punaises sur des punaises
Des ptiriasis sur des ptiriasis
Des Westminais sur des Westminais
Des rangées de rangées sur des rangées de rangées
Sur est super

sur ceci
Sur cela
Etre dans la direction d’un objet, l’avoir en face
En face d’un visage renversé, d’un visage inverse

. . .au pays des gueux, un orpailleur devenu riche ne mangeait plus que des
Corruptions d’orange

« quelles jolies petites taches rouges » pensait l’orpailleur dînant
« Ça fait des lésions, des crimes, des régiments de crimes »
« Ça dessine des proies pour la fourchette, pour ma jeune Arbalète »
« Ça me rappelle les roses prémisses d’Athalie »

il mangeait donc des champignons, cet orpailleur
Roses et gris, des taches
Il s’en emparait sans faire de théâtre
Sans déchirer son costume

il les trouvait dans l’ombre des travées
Là où flotte le soufre, « . . .mais où on manque d’oxygène »
« Aux pieds des oreilles de l’Église » disait-il
« Là où on fait semblant d’être mort » disait-il encore

aux mots, il faut ajouter des mots
Et aux nouveaux mots, encore des mots
Et aux morts, encore des morts
Et au contraire du vide, encore le contraire du vide

des insectes minuscules sur des insectes minuscules
Des champignons à clôtures sur des champignons à clôtures
Des visages détournés sur des visages détournés
Des rangés d’effroi sur des rangés d’effroi

aux pieds des oreilles d’Athalie
Des taches sur des taches sur des taches sur des taches
Des symboles gazonnés sur des symboles gazonnés
Du sel d’or sur du sel d’or

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[Image : De l’or pour les orteils d’Athalie par reading_is_dangerous]

QUAND LE FEU AGIT


je traite les costumes de bal
Gratis

les costumes qui ont souffert de longues privations
Ceux qui ont perdu la carte
Ceux qui ont glissé sur des terrains boueux
Ceux qu’une goutte d’humeur tombée dans l’œil a rendu aveugles
Ceux qu’on a jamais vus au théâtre parce que. . .
Ceux qui n’imaginent rien de mieux pour eux-même qu’un triste deuil

je traite les costumes de bal
Gratis

les enfants perdus, les enfants de perdition
Ceux et celles qu’on a poussés à bout
Ceux qui ont raté un tournant
Ceux qui ont jeté leurs dents au moulin
Ceux qui n’ont jamais compris ce que c’est que le diamètre

le diamètre du cercle
Le diamètre du chaudron à étoffes
Le diamètre du cœur
Le cœur d’un costume de bal

bal des fêtes à moitié oubliées
« Le Bal des Contractions normandes »
« Le Bal des Échappées de leurs demeures »
« Le Bal des Steppes et des chevaux galants »
Lesquels chevaux dansent le trois-huit, le trois-quatre, le deux-cinq

le bal appartient aux ventres
Au culte des ventres
Aux armes des ventres
Aux ramas de mauvais ventres. Tant pis !

quand la nuit brille
Quand le vent dort
Quand l’été passe
Quand les lampes frissonnent
Quand le feu agit

je traite les costumes de bal
Gratis

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[Image : Costumes de bal par reading_is_dangerous]

vendredi 22 juin 2007

LA POISSONNERIE

il a l'habitude, la manie de louer les mérites de l'être suprême à qui il dénie pourtant l'entrée de sa demeure. C’est une façon de tyranniser la raison, la sienne. Ça fait bidon, il en convient, mais il croit que c'est passager

nous l'espérons pour lui
. Nous tentons de le soigner au rutabaga mais c’est une triste goutte de plante, dans la mer des choux

il dit : « Il y a des choses que nous ne disons pas, faute de savoir les dire, par où les prendre, comment s'en saisir, par quel mot. Je connais des créatures qui gémissent de ne pas savoir articuler des monstruosités »

des vérités désagréables restent ainsi enfermées. Voilà le grand abus de la science du monde, comme disait Bourdaloue

il dit : « Louons ! Louons la Terre à des moins cons que nous. Nous pourrons facilement vivre sur telle ou telle petite lune. . . séparément. . . Moi, tous les jours, j'aurai à boire du chambertin ; j'aurai à savourer des viandes grasses et cuites sur le gril »

il dit : « Partons ! Sautons sur le vent autan. Il nous portera loin des rois, des croix, des trônes jamais renversés, loin de tout ce qui est fait pour qu'on reste assis, qui fait de nous des culs »

il crie encore : « J'ai l'habitude ! J’ai l'habitude de rester assis chez moi. . . Chez moi ! »
Ce pauvre fou. Chez lui, à cent lieues de la mer, il gribouillait des rimes de poissonnier

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[Image:
La poissonnerie par reading_is_dangerous]

jeudi 21 juin 2007

L'HYGROSCOPIE SCARLATINE


on dit que
Le son des moteurs agit sur le développement de
Certaines fleurs sapides parmi lesquelles
L'hygroscopie scarlatine au goût de rein

mieux connue sous
Le nom d'enfant comptable, cette plante qui fréquente les
Rocailles est un excellent
Indicateur de la teneur en eau de l'atmosphère

l'eau corrompue la tue
Les paroles sèches aussi. . .
Le son continu d'un moteur à explosion fait s'effondrer les
Parties délicates de la fleur

parties qui ressemblent à des
Billes de fer comme en collectionnaient autrefois
Les enfants pour leurs
Chevaux malades

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[Image: Porte de fer en bille par reading_is_dangerous]

mercredi 20 juin 2007

L'INSECTE PERIODIQUE


pendant que l'astre du jour accomplit une révolution
L'insecte Périodique pond une nouvelle planète
Ainsi on ne manque pas de régions sauvages à explorer

pour traverser l'espace (et le temps)
Il suffit de se donner à soi-même une bonne nasarde
Le coeur fait alors un double tour et on se voit projeté

ce genre de voyage ramène la vigueur au corps
Il faut soudainement à l'esprit un monde sur lequel se ruer
N'importe lequel ; le Tout-Puissant vous le cède par bail emphytéotique

quelles seront vos priorités en tant que nouveau locataire des lieux ?
Cultiver du rutabaga
Cultiver de l'osier - à vous d'y voir

il vous faudra bien sûr quelques esclaves
Pour décrasser la tête de vos enfants
Pour décrotter vos souliers

j'en vends qui parlent le latin
J'en vends qui brûlent en dégageant un agréable fumet
J'en vends qui savent jouer au roi et aux bandits

avec le temps, votre planète s'écartera de ce qu'elle était
Elle ressemblera à un potage où cuisent diverses viandes
Ce qui ne veut pas dire que vous ne voudrez pas la retenir

mais tôt ou tard, l'envie vous prendra de vous élancer à nouveau
Peut-être après avoir terminé la rédaction d'une Histoire
Peut-être après avoir ressenti le frémissement d'un appendice

comme la voix qui souhaite changer de registre
Comme le clignotement des passions signale une urgence
Comme l'enfant entre ses deux dentitions. . .

vous vous trouvez maintenant affamé
Vous rapportez votre faim à des questions plus générales
Il vous semble connaître une fièvre. . .

le temps est venu de vous appliquer une pichenette sur le nez
Une solide chiquenaude, et hop !
Tout est reparti

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[Image: L'insecte Périodique par reading_is_dangerous]

LA PLANTATION DE CRIS


ils ont des plantations de cris
Des êtres magiques et haïssables y travaillent
En forçant un peu le substratum, on obtient trois récoltes par an

leurs outils caractéristiques comptent le perçoir à danse
Le saigne-sueur à images
Et une sorte de renversant bien lourd

le perçoir à danse sert à faire défaut
On l'utilise dès le premier jour d’une saison de cent
Pour introduire ignorance et crainte

le saigne-sueur à images induit des désirs indus
C'est un filet comme un tramail, qui occupe tout l’espace
Impossible de ne pas échapper un cri quand on s’y prend les pieds

le renversant permet de récupérer des énergies recluses
C'est une lime lourde mais qui va gratter partout même si vous n'allez nulle part
Son usage constitue une tâche ingrate, interminable

quant aux ouvriers, je l'ai dit, ce sont des êtres haïssables
Nés dans des mares de divergence
Nourris aux sparadraps

ils savent d'instinct enfiler des cris sur des tiges rigides
Des cris lâchés par des patriarches, des gouverneurs, des victimes classiques
Des cris de tête, de cervelle, des cris du derrière ou du for intérieur

tout ça rapporte gros ! Or on m'incite à acquérir une plantation
C'est une belle occasion
Mais. . . j'hésite

à vendre, il y a aussi des champs de gorges
Des vergers de brunettes
Des serres où croissent des légumes çexotiques

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[Image: Perçoir à danse par reading_is_dangerous]

mardi 19 juin 2007

LE MOMENT DE NE PAS BOUGER


petits moments du quotidien, moments heureux
« Petits, petits, venez ici ! »

venez manger ! Il faut grossir
Pour qu’on vous aperçoive d’une lieue à la ronde

les petits moments se perdent souvent en chemin
Certains ne trouvent jamais ma porte

des liens parfois les restreignent
Certains périssent séduits par le chant des sirènes

petits moments du quotidien, moments heureux
« Petits, petits, venez ici ! »

venez, venez !
Quand il y a eu défaillance, diminution, évanouissement
Quand l’appétit est grand
Quand on vous a réduit en grenailles comme du plomb
Quand on vous a confondu avec de simples incidents

venez, revenez !
Petits moments ont du mérite
Petits moments soulèvent les paupières
Petits moments portent des paniers de fruits
Petits moments font des mélanges, des assortiments, des coloris

. . .des tableaux pour cacher la nudité des murs
Des roulettes sous mes pieds pour traverser la vie
Des sonnettes pour me préserver du somnambulisme
Des pochettes-de-joie « petits moments » pleines de diamants

. . .près d’énormes fleurs exotiques, je vis un petit fauve mal réveillé
« C’est le moment de ne pas bouger. » me dis-je, bienheureux

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[Image : Le moment de ne pas bouger par reading_is_dangerous] (9 avril 2007)

LE JARDINAGE



je jardine
Des bras par ici
Des cuisses par là

je renoue des rubans
Un intestin que j'avais déroulé
Une langue qui manquait d'exercice

un grand chien dansait dans mes bras
En rêve, c'était moi le « dieu » du tango
Le soleil nous brûlait la peau

un sentier nous mena à une nymphée
Une jolie grotte avec des bassins, des statues, des coussins
Et une princesse qui sentait bon la rose. Elle me demanda :

« pouvez-vous mettre à bout cette terre rebelle ? »
C’était une drôle de question, vu mon métier
Mais cette fille voulait des pommes, des vignes, des tomates

or moi qui danse avec les chiens
Moi, jardinier, je. . . comment vous dire ?
Des bras par ici, des cuisses par là

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[Image : Le Jardinage par reading_is_dangerous]

lundi 18 juin 2007

PENDELOQUE ET MARTIALE


je remue ici des mots pour les jeter ensuite, ailleurs
Ces mots que le temps n'a pas su achever

j'en examine parfois un à la loupe
Pieds nus dans la terre

un corps de jupe en acier rouillé irait bien à celui-ci
Tel autre ressemble à un méchant moustique

heureusement que je surveille. . .
Vu la rareté de l'air. . . trop de mots nous écraserait

avec ce qui reste, j'écrirai peut-être une satire
Je m'intéresse aux taches de l'histoire

couleuvres humaines et tachetées de rouges
Sujets de la tératologie

êtres tronqués, sans coeur
Vers estropiés, graillons de rois et d'empereurs

petites noix
Petits gigots avariés
Petites rancissures
Sueurs, tumeurs blanches
Napoléons, sarcorniauds débiles

je vous remue des mots
je vous remue ici des mots pour les jeter ensuite, ailleurs

vos procédés : saignées, chasses aux sorcières, monopoles
Votre exécrable boléro

un jour viendra nous vous ferons danser
Au bout du vent. . .

La vérité nue, monsieur le Juge
Vérité nue, pendue à l'oreille

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[Image: Pendeloque et martiale par reading_is_dangerous]

dimanche 17 juin 2007

LE MASQUE VENU DU DESERT


dévorer
dévorer la raison
la raison et ses nombreux visages

visages comme des chenilles
nées en avril, trop tôt
en raison d'une substance chimique qui traîne dans l'air

faisons des cordes de tout
des cordes de partisans politiques
qui entourent ces crétins égoïstes et prostitués qui vendent nos pays

moi, sorcier, j'habite le désert
j'écoute le tic tac des astres mécontents
bientôt tombera du ciel une nouvelle proposition

un peu de chair salée pour les dévoreurs de raison
une triste fête pour l'humanité qui rêvait d'être l'enfant unique
d'un dieu qui lui aurait donné ses dix doigts

pour se gratter ces endroits où ça passe
pour arracher à la terre tout ce qui dépasse
pour talonner du pouce ou de l'index

savants ornements
sales excréments
Sade, le Formidable, n'a rien gardé pour lui

qui oserait écrire dans son bidet
qui oserait écrire en vidant un bidon
qui saurait dévorer la nomenclature sans faire de miettes

je ne retournerai pas aux détails
je ne retournerai pas aux malencontreuses
je ne retournerai pas aux nuages où je grandissais

prenant aujourd'hui plaisir à dévorer
j'attends le jour où un restituteur rendra à chacun sa raison
son sang, ses humeurs. . . voyez: Ça ne coule plus

promener
promener une image
promener un masque

UN MASQUE VENU DU DESERT

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[Image: Chie-en-lit par reading_is_dangerous]

LE REGNE DES TERMITES


j'étais
J'étais radio-thermomètre première classe
Sur le Rivermann Dog, un petit sous-marin

le monde avait bien changé
Des icebergs descendaient maintenant les rivières
Mais leur terrible beauté signifiait toujours la mort. . .

notre navire se cachait souvent derrière l'unique pilier
D'un pont extraordinaire (j'en reparlerai)
Pourtant des camions gigantesques descendaient eux aussi la rivière

un jour, comme je mesurais la température de l’eau
En compagnie du capitaine qui prenait l'air
Nous vîmes un groupe de femmes et d'enfants épuisés

ils marchaient sur l'eau (était-ce encore un miracle ?)
Mais plusieurs étaient blessés
Le capitaine fit signe à une femme qui peinait plus que les autres

elle vint vers nous avec son garçonnet et une femme terrorisée
Cette dernière avait le visage violet
Mais elle disparu ou coula

le médecin du Rivermann Dog fit ce qu'il pouvait
Il donna des antibiotiques à l'enfant
Sa mère voulut nous remercier en nous offrant de. . .

je la regardai
Elle était jolie, une blonde aux yeux bleus
Mais je vis aussi qu'elle était une véritable termitière

de gros, de gras termites dorés habitaient le corps de cette malheureuse
Vivantes topazes, seigneures d'un sac de sang
Le monde avait bien changé, mais. . .

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[Image: Le règne des termites par reading_is_dangerous]

vendredi 15 juin 2007

JE PLIE DU RIZ


je plis des grains de riz
Ce n'est guère facile mais ça me permet d'oublier
Que je n'ai rien d'autre à plier

je n'ai rien non plus à déplier
Ni doux billets
Ni billets de banque
En passant, c'est Casanova qui disait: Méfiez-vous de l'argent papier

billets de fous plutôt que faux billets
Billets écroulés qu'on écoule dans des économies qui s'effondrent
Billets et bulles
Belles et buts
Belzebuth
Mon but est une belle bulle que j'achète avec des billes

que pensez-vous d'une pelle en rut ?
De ces pelles qu'on roule en se prenant la pêche
De ces truelles qu'on troue en se branlant le manche
De ces ruelles qu'on fouille en se ruinant la hanche
Que pensez-vous ?
Que pansez-vous ?

en passant, je suis écraseur de poux
Je suis écrabouilleur de mou
Je suis zèbre à mouilleur de choux
Je suis zébulon à cireur de goût

« c'est comme ça qu'on se perd, et la poésie ne veut plus rien dire. » croyez-
vous. Je suis assez d'accord

je plie donc du riz
Ce n'est pas facile mais ça aide à oublier que. . .
Je n'ai rien d’autre à scier
Rien d'autre à nier
Rien d'autre à lier
Pas de mots ou de phrases à relier
Pas de maître ou de Sauveur à renier
Passons !

passons sous les ponts
Passons loin des cons
Passons nos mains habiles sur les roulements à billes des jolies filles
Roulements et déroulements
Filles à rouler
Filles à roulettes
Filles ou boulettes
Filles à déplier
Filles à replier
Filles à oublier
Filles qui me plaisent au lit
Filles qui se taisent ou rient
Filles qui déplient des chaises, en bikini

c'est l'été
C'est l'été chaud
C'est l'été chaud et j'ai en marre du riz

tenez, aidez-moi, je vais plier des plies (pas des plis, des plies)

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[Image: Aujourd'hui, je bois de la Gyumri par reading_is_dangerous]

jeudi 14 juin 2007

ENTRE SOI ET SOI

quelqu'un avait inventé la mitrailleuse à centrifuge
Silencieuse
Efficace

Simon Forgetting développa une arme de poing similaire
Légère
En plastique
Qui projettait des billes d'acier à grande vitesse
Grâce à l'action d'un petit moteur électrique
Alimenté par une dynamo manuelle

le gouvernement […] lui acheta ses plans
C’est ainsi que Simon Blanc devint richissime
Bien sûr il en perdit quelque peu le sommeil
D'imaginer
Des coeurs, des poumons, des têtes, des bras, des jambes
Des cous, des dos, des ventres, des ailes sans doute. . .
Percés
Irrémédiablement percés
Au mauvais moment
Au mauvais endroit
Pour les mauvaises raisons (. . .)
Tandis que lui, Simon Blanc
Pouvait se faire dorer sur telle ou telle plage exotique
Adoré par des mains multicolores et parfumées

Simon Forgetting dormait donc de moins en moins
Jusqu’au jour. . .

Blanche, la fillette d'un ami (le légendaire Richard Artwater)
Cherchait son papa disparu SOUS UN SOLEIL BLANC

Simon Blanc trouva un cheval blanc
Qu'il amena avec lui
Pour la petite
Et tous trois
Simon Forgetting
Blanche Artwater
Et le cheval blanc
. . .tous trois se mirent en route

Ainsi débute cette histoire
Je peux vous la raconter d'un bout à l'autre. . .
Si vous le souhaitez

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[Image: Entre soi et soi par reading_is_dangerous]

mercredi 13 juin 2007

SOUS L'ESCALIER, RUE DAMACHAISE


rue Damachaise, numéro Dix
Un chien sans médaille mord la main d'un garçonnet

on mène le petit chez un médecin
Tandis qu'un policier du quartier se charge d'abattre la bête coupable du crime

« le gamin tordait les oreilles du chien. » explique une vieillarde
Couchée au sol(?). C’est la vérité

on tue pourtant l'animal
Plus onze autres chiens
Parmi lesquels le Vieux Nikto, un doux guépard, noir, doré
Qui habite en bas de chez moi, sous un escalier
Jusqu'à ce dernier moment
Quand le flic, cet imposant imbécile
Lui tire une balle dans le nez
En dépit de mes protestations réunies à celles de la vieille

la carcasse du Vieux Nikto, c’est moi qui l'enterre
Maudissant cette journée, le douze juin
Qui nous enlève l'ami qui nous garde depuis treize ans
L'ami qui nous garde des rats
Contre les rats
Lesquels vivent en grand nombre, ici

non loin des rives de la Mandre
A l'extrémité nord de la rue Damachaise
Numéro Quatorze
Sous l'escalier
Habite désormais l'ombre seule d'un vieux guépard, noire, dorée
Mais une ombre, voyez-vous?
Rien ne sert de lui jeter un os
Rien ne sert de l'appeler par son nom

Tiens ! tiens ! un gros rat qui passe
Emportant une enfant (de quinze ans)

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[Image :
Sous l'escalier, rue Damachaise par reading_is_dangerous]

jeudi 7 juin 2007

JE DEFAIS DES PRUNELAIES


je défais des prunelaies
Oh! Il y en a pavées de dalles
Vous imaginez ce qui se passe quand on hoche les pruniers. . .

j’étais hier à la maison de la Brune
“Le maître de céans n’est pas là.” me dit cette belle fille
C’était le moment de la revenue, quand la bête quitte les bois

j’avais avec moi la corde du vieux puits dont le seau coulait
Le goutte à goutte. . . comment dit-on? La stillation
Le bruit de l’eau qui chutait me rappelait cette douce cotonnerie où je travaillai autrefois
Or on a changé le seau. En guise de représailles, j’ai volé la corde !
Puisez l’eau avec une calebasse si ça vous chante, mais
Depuis le grand schisme d’Occident
Nul n’a crevé dans sa peau autant que moi ;
On m’a forcé à sous-louer une partie de mes terres, bien vrai
C’est la faute de cette fille qui s’est cloîtrée
Après qu’elle eut découvert (et annoncé à sa famille) mon scepticisme

“Allons !” que j’ai dis à la Brune. “Voyons la stratification des tissus de vos organes.”
Elle a crié des trucs. . . ça ferait de la bonne poésie (une pastorale ?)
Oh ! Ses cris faisaient. . .
Comme des égouttements
Comme ces déchirements, quand je vous défais une prunelaie
Vous imaginez ce qui se passe quand on hoche les brunes. . .

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[Picture: Horrible stratification par reading_is_dangerous]

mercredi 6 juin 2007

SUR UNE PLAGE DU NORD


Sur une plage du Nord, une trentaine de personnes contemplent une mer tranquille et jaune. “Elle est bien jaune.” dit un monsieur à lunettes. “On dirait qu’on a pissé dedans.” dit une jeune femme en mini jupe. “Oh !” pousse une dame qui tient un parapluie. “Ce sont les animaux de la mer qui ont pissé un bon coup avant de crever.” dit un costaud. “Vous voulez dire : Les poissons ?” demande un type en cravate. “Quoi ? Tous les poissons sont déjà morts ?” demande un gros. “Pas encore !” dit une mystérieuse fillette. “Comment ?” demande la foule.

La mystérieuse fillette a les yeux bleus comme autrefois le ciel. Son teint est pâle. Elle est vêtue de rouge. “Tiens,” dit le monsieur à lunettes, “c’est le petit Chaperon Rouge. -Alors,” dit la jeune femme en mini jupe, “il est où, le grand méchant loup ? -Oh!” pousse la dame au parapluie. “C’est peut-être le loup qui a pissé dans la mer. . .” dit le costaud. “Mais de quel loup parlez-vous donc ?” demande le type en cravate. “Pas du Vieux Loup De Mer, j’espère !” dit le gros. “C’est mon restaurant ! -Pas pour longtemps !” dit la mystérieuse fillette. “Comment ?” demande derechef la foule.

Le gros pâlit. Sa veste bleue (comme autrefois la mer) se tâche de rouge vif. “Vous saignez du nez.” lui dit le monsieur à lunette. “Prenez cette serviette sanitaire,” dit la jeune femme en mini jupe. “Oh !” pousse la dame au parapluie. “Notre gros ami a peur du loup !” dit le costaud. “Mais taisez-vous donc !” dit le type en cravate. “Les poissons, c’est toute ma clientèle !” dit le gros en s’épongeant le nez. “Votre clientèle s’est empoisonnée !” dit la mystérieuse fillette. “Comment ?” demande toujours la foule.

“Ne vous inquiètez pas !” dit un barbu. “Dans une quarantaine de jours tout sera fini. -Fini, comment fini ?” demande la foule. Le barbu prend un air mystérieux, et puis s’en va sans répondre.

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[Image: La mer est jaune par reading_is_dangerous]

mardi 5 juin 2007

LES TROIS BATONS


à gauche, plus d’un milliard d’hommes et de femmes
Esclaves
Produisaient des choses de plastique et qu’on vendait ensuite à droite

beaucoup d’argent allait donc de la droite vers la gauche, mais ces
richesses (ce papier)
revenaient rapidement depuis la gauche vers la droite
Sous forme de prêts
Qui servaient à financer les achats en bois bien sec et nécessaire pour des holocaustes
organisés dans des pays marqués pour le sacrifice

beau système, voyez-vous !
Bravo !

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[Image: Les trois bâtons par reading_is_dangerous]

dimanche 3 juin 2007

VIVE LE BAVIUM !


il fait déjà loir
annume la numière
envoye donc
envoye
envoye la numière que je te dis

grosse vache molle
dans le loir de quoi tu as peur
les méchants sont partis
envoye je te dis
envoye
envoye la numière sinon je me fâche

ah! Reste donc assis dans ta crasse
La médiocrité, tu aimes ça
Des lunes et des années
Des chèques de paie
Des petits plans de petit lemming
Des petites routes faites pour qu’on reste dessus
C’est devenu presque impossible que de frapper un arbre

frapper un homme, non
Mais aplatir toute une population, oui
Empoisonner les enfants aux boissons gazeuses, pourquoi pas
C’est plein de bisphenol A là-dedans
C’est plein de colorants pas trop aimables
Il faut penser aux reins qui travaillent pour rien
Il paraît que le benzoate sodium détruit les mitochondries
Il paraît que c’est une cause d’hyperactivité chez le petit enfant
Le petit enfant
Donnez-lui donc du Bavium
Ça ne sera jamais pire que le Ritamalin
Ritamalin
Ritamalin
Le mal ne vient pas de l’extérieur d’après toi, hein?
Non! Ainsi donc le mal vient de l’intérieur
Le mal vient de toi
Le mal est en toi
C’est pour ça qu’il faut t’assommer
Tiens, prends du bon Projacques
Non? Tu préfères le bon vieux Bavium?
Bon
Bon
Bon
Bons bonbons

envoye
envoye la numière que je te dis
envoye la numière qu’on puisse tous voir quelle sorte de bébé tu es
bébé lemming
bébé vache molle
bébé aimant la crasse
bébé bavium

. . .debout dans un torrent glacial je pleurais de chaudes larmes pour toi

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[Image: Vive le Bavium ! par reading_is_dangerous]

samedi 2 juin 2007

LA THEORIE DU PLEIN


il semble impossible qu’on puisse rater sa vie quoi qu’on fasse et quoi qu’on en fasse
Je vous le dis franchement
Je ne vois pas
Je ne vois qu’on puisse rater sa vie

ça donne du coeur d’y penser
Ça donne des moyens
Du courage pour écrire des poèmes ou des lettres terribles
Pleines de monstres pleins
Des lettres pleines de monstres à naître
Des lettres rondes et qui débordent
Des lettres qui piquent
Des lettres qui attrapent
Des lettres qui mordent

ce matin, j’ai mangé une aiguille
Demain, un bol de clous
Après-demain, une cheville
Dans un mois, le cou d’un immeuble de vingt-trois étages
Dans un an, l’immense taïga

l’autre nuit en rêve, je me lançais dans le vide
Une fois
Deux fois
Trois fois
Bien sûr que je sais voler en rêve
Depuis trente ans que j’améliore ma technique
Ah! Si j’écrivais en songe
Je pourrais enfin prendre mon envol
Survoler des pays imaginaires sans risquer de m’y écraser

je ne suis bon qu’à chercher des atomes hypothétiques
D’or
Une fleur
Un charme
Le centre d’attraction de ma pensée qui butine
Voyez-vous, j’ai tout compris mais je ne parviens pas à expliquer ce que j’ai compris

c’est un phénomène fréquent ou qui l’était
Un homme partait dans la forêt
Il y rencontrait une louve ou un léopard ou une faim
Cette rencontre, ça le faisait réfléchir
Notre promeneur
Notre promeneur

aujourd’hui je me promène en ville et c’est finalement aussi bon
Seulement les signes ont changé
Le chemin indiqué devient tous les jours plus ardu
Quoi qu’il en soit, comme je le disais, impossible de rater sa vie
Ce qui n’empêche pas qu’on se perde
Ici et là
Dans le brouillard
Dans le brouillard rose des chairs empoisonnées
Dans le rose brouillard des idées sans chair
Dans le rose brouillard des idées fixes et sans flair

qui n’a pas l’odorat bien développé va s’y perdre
Qui a l’oeil mort, nage mal
Qui n’a pas d’oreille
Qui n’a pas de mains
Qui n’a pas. . .

oh!
Il me faudrait encore un couteau
Couper ce qui dépasse
Couper ce qui passe
Couper ce qui pa. . .
Qui passe sur le cou. . .
Qui passe sur le cou, couper

oui!
Un énorme coutelas bien aiguisé
Une lame qui fasse peur au ciel lui-même
Une lame qui tranche à l’endroit même où naissent les vagues
Une lame qui décapite le brouillard
Une lame qui fasse reculer les flammes
Une lame qui exécuterait les larmes d’une enfant
Une lame qui taillerait en petits morceaux l’incompréhension et la méchanceté
Une lame qui te couperait l’oeuf en minces lamelles

un microscope
Un bon microscope relié à l’oeil d’une bonne caméra vidéo
Ça me donnerait des images
De quoi écrire pendant encore dix mille ans
Tiens, je devrais peut-être quand même me relire de temps à autre

à pleins yeux, à pleins yeux, à pleins yeux
Depuis longtemps que j’ai une theorie du vide, il me faudrait maintenant une théorie du plein

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[Image: Le revolver à billes d’or par reading_is_dangerous]