jeudi 1 février 2007

PLANCHE


Elle préparait des poissons pour le dîner. “Malheur !” dit
une truite. La cuisinière lui
coupa la tête. “Malheur ! Oh ! terrible malheur !” dit un second poisson. La
femme lui caressa l’oeil, puis elle toucha sa chair rose, pleine, douce,
humide. Elle lui gratta la queue. L’air était jaune.

Elle imagina une grande flaque d’eau où habitait des carpes, où
tournait des esturgeons, des saumons parachutés, des escargots perdus, des
têtes égarées. Cette foule aquatique, la cuisinière rêvassante la nourrissait
matin et soir. En après-midi, elle recevait des célébrités de
notre temps, des personnes aperçues à la télévision, dans les films, les
journaux, les illustrés; sur Internet. “Tout le monde mangera
des céréales de blé entier,” songeait la femme, “et celles et ceux qui
n’en mangeront pas assez, on leur tranchera le cou
avant les autres.”

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[Image: Cuisine par reading_is_dangerous]

pupille noire
du poisson sur la planche;
un goût d’au-delà

2 commentaires:

  1. When reading this it seemed to me to be a morbid expression of feeling of attachment and caress. Does it come from a desire to be killed as a proof of love? I don't know. Guess you'd like to be a fish? Well, a celebrity said that it's ok to eat fish, 'cause they don't have any feelings.

    Though I think what you've written is pretty cynical, on behalf of escargots perdus :) I want to thank you for writing this with so much imagination

    Though I'm angry with this entry. I'm not sure why...

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  2. I hope this works. Did you know the first time I looked at this poem, there was an ad for sushi? I like the poem, as always. Je l'aime bien--un gout d'au-dela. Je m'excuse pour l'orthographe manque. (e)
    A bientot!

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