Baboa riait. De tout il aurait rit
à moins qu’on ne l’eut invité à signer son nom en
bas d’un contrat signifiant des
millions. Il
riait, il riait quand on lui parlait de la lumière du jour ou
du goût formidable d’un fruit si rare qu’il lui était encore inconnu, à
lui, Baboa qui avait pourtant beaucoup
voyagé. Il riait comme l’enfant né l’an dernier. Il riait comme une brute
paralysée par la faim, qui n'aurait pas su quitter la caverne humide où elle se
tiendrait cachée depuis qu’on lui ferait la chasse. Baboa riait
comme la hyène rousse lorsqu’elle sent venir la mort des kilomètres à l’avance, dix
ans, vingt ans, trente ans à l’avance. C’était une sorte de cynisme indestructible
qui avait envahi Baboa, il se trouvait véritablement enfermé dans une chambre
sans porte ni fenêtre, où même une fourmi obstinée
n’aurait su y trouver une issue. Baboa riait, clown
triste quand il se démaquillait, c’était peut-être
la dix millième fois? Se démaquillant, il songeait
que le temps était venu de partir (mais où partir?) quand il aperçu son écoeurant
patron, le directeur du cirque Viva Vita! venu lui dire d’une voix
chocolatée qu’il faudrait sans doute que Baboa apporte
quelques modifications à son numéro, histoire de le rendre plus interactif. Pauvre
clown, il savait bien que protester ne servirait à rien. Il modifia
sn numéro en vain puisqu’on le vira un matin quand il
ne s’y attendait pas. On le vira
“Tiens,” se dit Baboa, “il a neigé cette nuit”. Il lui restait à
rassembler ses affaires, notamment quelques vêtements sur une corde tendue
entre sa roulotte et celle de la femme-baleine. Trouvant son linge, il prit
des pinces de bois. “Non, elles ne sont pas à moi” se dit Baboa, mais
les examinant, il découvre sur l’une d’elles un mot gravé, une
vérité, une explication au mystère de la vie, une raison de vivre qui
aurait aussi bien pu être une raison de ne plus continuer à vivre. Soudainement
Baboa voit clair. Il rit. En riant, il s’écroule, il tombe dans une neige molle qui
l’accueille. Il fait froid. Il fait chaud. Il fait tout ce que Baboa désire. La
vie ressemble enfin à ce qu’il espérait d’elle. Eprouvant pour la première fois un
réel bonheur Baboa s’en va
…le chant de la femme-baleine qui trouva dans la neige son voisin foudroyé
attira une foule telle que le directeur du cirque Viva Vita! eut l'idée géniale d'en faire
un nouveau numéro. Depuis ce jour, elle chante
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[Image: Vous et moi par reading_is_dangerous (Jan 18, 2007)]
crochets fatigués;
entre deux noeuds le court fil
à ne pas lâcher
entre deux noeuds le court fil
à ne pas lâcher
The photo is just great! I'll try to make sense of the text now :)
RépondreSupprimerAgain, thanx for the photo, it impressed me much.
Lilit
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